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03

fév

2011

Mixité sociale et urbanisme : FDR souhaite aller plus loin.

A l'occasion du débat parlementaire organisé pour les 10 ans de la loi Solidarité et au Renouvellement Urbains (SRU), François de Rugy revient sur l’application de ses différentes dispositions.
La mixité sociale a évolué mais mérite une 2e phase prévoyant de plus lourdes pénalités pour les communes récalcitrantes, une intervention sur les loyers, les logements vacants, insalubres…

M. François de Rugy. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État chargé du logement, mes chers collègues, nous sommes réunis pour dresser un rapide bilan de l’application de la loi dite SRU, qui a maintenant plus de dix ans.

Je rappelle qu’elle est le fruit du travail de notre collègue Claude Bartolone, alors ministre de la ville et son principal inspirateur, de Jean-Claude Gayssot, qui était ministre de l’équipement et des transports, et de Dominique Voynet, à l’époque ministre de l’environnement.Dix ans après son entrée en vigueur, on réduit trop souvent la portée du texte à une seule disposition : l’obligation faite aux communes d’une certaine taille de consacrer au logement social au moins 20 % de leur parc de logements. Il y a bien d’autres aspects dans cette loi, qui est en réalité une loi sur l’urbanisme. Je note du reste, monsieur le secrétaire d’État, que l’intitulé de vos attributions vous confie non seulement le logement, mais aussi l’urbanisme, ce qui est une bonne chose.

Nous, écologistes, avons beaucoup soutenu la création des schémas de cohérence territoriale ou des plans d’aménagement et de développement durable, destinés à encadrer et superviser les plans locaux d’urbanisme, qui ont alors remplacé les plans d’occupation des sols. L’objectif est de donner de la cohérence à la politique d’urbanisme, au-delà des limites communales. On le sait, c’est un ouvrage de longue haleine, dont seules les premières pierres ont été posées.

Lors de l’examen de la loi Grenelle 2, nous avons eu un débat sur l’urbanisme : il s’agissait de savoir si cette compétence devait devenir intercommunale, et non plus simplement communale. Avec Yves Cochet, ici présent, nous avons soutenu cette disposition, également proposée par des députés de la majorité, dont Michel Piron.

De fait, la question du droit du sol et celle, plus générale, des recettes fiscales des collectivités locales sont au fondement de la politique d’urbanisme. Nous souhaitons des évolutions législatives en la matière, afin de façonner un nouvel urbanisme qui placerait au cœur de la politique de la ville non seulement la mixité sociale, mais aussi la mixité entre logement et activité.

Je l’ai dit, on a surtout retenu de la loi SRU l’obligation de compter 20 % de logements sociaux. Sur ce point, naturellement, tout n’a pas été réglé en dix ans, et les inégalités territoriales n’ont pas disparu. Je pourrais dire, en prenant un exemple caricatural, assez éloigné de la circonscription dont je suis l’élu, que la Seine-Saint-Denis reste la Seine-Saint-Denis, toujours confrontée aux difficultés sociales et que les Hauts-de-Seine restent les Hauts-de-Seine, avec les riches dotations fiscales dont un tel département peut bénéficier. Reconnaissons toutefois le chemin parcouru ; reconnaissons l’utilité de cette loi, qui a fait évoluer la situation dans nombre d’intercommunalités.

Ainsi, dans la communauté urbaine de Nantes, la construction de logements sociaux a connu une dynamique nouvelle dans des communes qui n’en comptaient pas ou qui n’en avaient pas construit depuis longtemps. On a donc progressé sur la voie de la mixité sociale.Pourtant, ce dernier objectif n’a pas toujours été et n’est pas toujours partagé, à droite, où d’aucuns s’y sont déclarés plus ou moins ouvertement hostiles, mais également au sein de certains courants de gauche. Je me souviens ainsi de débats, dans les collectivités locales où j’ai siégé, au cours desquels les élus d’extrême gauche se montraient très opposés à la mixité sociale.Le regard que l’on porte sur le logement social a également changé – ce qui est un point positif – à mesure que les logements neufs étaient construits, certaines communes appliquant même l’obligation à chaque immeuble, et non plus seulement à la commune tout entière. On a ainsi pu appliquer l’objectif à un immeuble par ailleurs susceptible d’être vendu, puis loué de manière autonome et privée.

En conclusion, il faudrait une loi « SRU 2 », une deuxième étape, prévoyant de plus lourdes pénalités.La Fondation Abbé Pierre parle ainsi de multiplier par trois les pénalités encourues par les communes, afin de rendre le dispositif beaucoup plus contraignant et beaucoup plus incitatif.Il faut également de nouvelles avancées en matière d’urbanisme et de logement, car on ne peut réduire la politique du logement à la seule obligation de 20 % de logements sociaux, ni d’ailleurs au logement social en général.Il faudrait donc transférer une partie des moyens publics actuellement absorbés par la politique de défiscalisation de l’investissement locatif, soit en faisant dépendre cette défiscalisation de critères beaucoup plus stricts, par exemple en plafonnant les loyers ou les revenus des locataires, comme à l’époque de la loi Besson – Louis Besson, s’entend –, soit lui assigner d’autres objectifs, de sorte que ces financements servent à la rénovation ou à la construction de logements sociaux.

Mais il faudrait aussi agir sur d’autres leviers, et d’abord celui du foncier. Aujourd’hui, des gens s’enrichissent en vendant du foncier sans avoir rien fait pour le valoriser : ils profitent simplement d’un changement d’affectation, sur un plan local d’urbanisme, d’un terrain, qui d’agricole devient constructible, par exemple, ou de l’installation d’une desserte de transports en commun à proximité d’un terrain constructible, lequel prend alors une valeur dont ne profite pas directement la collectivité qui a consenti cet effort.Il faudrait également agir sur les loyers, sur les logements vacants, sur les logements insalubres ou sur les copropriétés privées délabrées – car nous devons penser au locatif privé, et non au seul locatif social.

Telles sont, dix ans après le vote de la loi SRU, les quelques pistes de réflexion que nous suggérons. Nous serons très attentifs à votre réponse, monsieur le secrétaire d’État ; j’espère que vous venez délivrer un message. Votre collègue ministre de la ville a joué petit bras depuis sa nomination, puisqu’il a déclaré qu’il n’y aurait pas de plan Marshall, pas de nouveaux moyens.Que l’on ne parle pas de plan Marshall parce que la formule est un peu grandiloquente, soit ; mais que l’on dise au moins quelles ambitions nous nourrissons en matière de politique de la ville. Notre pays en a besoin, les quartiers en difficulté, qui n’ont pas disparu, en ont besoin, comme la politique du logement. Nous vous attendons sur ce terrain, monsieur le secrétaire d’État ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

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