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2011

FDR intervient lors de l'examen de la PPL relative aux dispositions d'ordre cynégétique

Le mercredi 11 mai 2011, François de Rugy s'est exprimé, via une motion de rejet préalable, à l'encontre d'une proposition de loi relative aux dispositions d'ordre cynégétique (relatif à la chasse). Retrouvez l'intégralité de son intervention ici.

M. François de Rugy. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je m’exprime au nom des quatre députés écologistes ; André Chassaigne interviendra, quant à lui, au nom des députés communistes.

Je n’ai pas été étonné que M. Bignon, auteur et rapporteur de la proposition de loi qui nous est soumise, ait longuement évoqué en préambule les conflits qui ont pu opposer, parfois de manière caricaturale, les pro-chasse aux anti-chasse, les écologistes aux anti-écologistes. Si je n’étais pas député à l’époque, je me souviens néanmoins du climat particulièrement détestable que certains députés de la majorité actuelle ont alimenté entre 1997-2002, sous la législature pendant laquelle Dominique Voynet puis Yves Cochet ont été ministres de l’environnement. Ceux-ci ont été souvent insultés, conspués, qui plus est lors de manifestations organisées par les fédérations de chasseurs, donc souvent en grande partie grâce à des fonds publics.

Si, aujourd’hui, le débat est en partie dépassionné, il faut se souvenir qu’à l’époque, il était instrumentalisé à des fins politiques. Non pas tant pour dresser un camp contre un autre – gauche contre droite, droite contre écologistes – que pour servir un mouvement politique émergent, lié, là encore, aux fédérations de chasse. Or, faut-il le rappeler, celles-ci gèrent en quelque sorte un impôt, ce qui est d’ailleurs une aberration du point de vue des principes généraux de notre droit, une aberration qui remonte, si j’ai bonne mémoire, à l’État Français et au régime du maréchal Pétain. Ce mouvement politique, Chasse, pêche, nature et tradition, pour ne pas le nommer, avait en effet tout intérêt à instrumentaliser à la fois la chasse et l’opposition, en faisant des écologistes des épouvantails qu’il agitait devant des chasseurs qui étaient bien souvent autant victimes que responsables de cette situation. Quelques intérêts financiers étaient également en jeu ; j’y reviendrai, car cette proposition de loi sert ces intérêts.

Le mouvement Chasse, pêche, nature et tradition a eu le destin qu’on lui connaît – et que certains comparent à celui des écologistes. Après avoir affirmé son indépendance et remporté quelques succès électoraux lors d’élections régionales et européennes, il a fini par perdre de son audience et par s’allier avec M. de Villiers à l’occasion d’élections européennes – on a pu alors mesurer sa prétendue autonomie politique –, avant de conclure un accord, à l’Élysée même, avec l’UMP. On a ainsi retrouvé, lors des dernières élections régionales, quelques membres de ce mouvement sur certaines listes de l’UMP, auxquelles cela n’a manifestement guère porté chance, et c’est tant mieux ! On peut également se féliciter que cette période durant laquelle la chasse était instrumentalisée soit terminée.

M. Étienne Blanc. Elle reviendra !

M. François de Rugy. Je ne crois pas, mon cher collègue. Certes, le mouvement Chasse, pêche, nature et tradition instrumentalisait d’autres thèmes, d’autres conflits, notamment l’opposition entre urbains et ruraux, qu’a du reste évoquée notre rapporteur. Mais nous savons bien que les intérêts des uns et des autres sont liés : nous n’avons pas d’avenir, séparément. Je serais curieux de savoir si, aujourd’hui, les chasseurs sont majoritairement ruraux ; nous savons en tout cas que, parmi eux, les agriculteurs sont minoritaires. Nous reviendrons sur ce sujet, car l’article 7, que Mme la ministre a très justement critiqué, a manifestement pour objet de satisfaire davantage les intérêts des urbains que ceux des ruraux. Quoi qu’il en soit, cette opposition artificielle a permis au mouvement Chasse, pêche, nature et tradition de prospérer pendant quelques années.

Vous souhaitiez, monsieur Fasquelle que je parle du texte ; j’y viens. Je veux dire à notre rapporteur, ainsi qu’à tous ceux qui ont cosigné la proposition de loi ou qui la soutiennent, que celle-ci est loin d’être neutre, même si vous prétendez qu’elle est essentiellement pragmatique. Ainsi, l’article 5 prévoit une diminution des redevances cynégétiques – une espèce de ristourne, donc – pour les nouveaux chasseurs. L’exposé des motifs est limpide : il s’agit ni plus ni moins que de favoriser l’arrivée de nouveaux chasseurs afin de pallier la baisse régulière de leurs effectifs. Or, si l’on est neutre, pragmatique, on ne se préoccupe pas de ce type de phénomène. Moi, je ne pratique pas la chasse, mais je ne suis pas pour autant favorable à son interdiction, si elle est pratiquée dans le respect strict des lois et des principes républicains.

Tout à l’heure, notre collègue Bignon a déploré que l’on ait ricané, sur certains bancs, lorsqu’il a posé une question au Gouvernement relative aux sangliers. Si l’on s’est permis de sourire, mon cher collègue, c’est parce qu’un tel thème ne nous semblait pas du niveau d’une séance de questions au Gouvernement. Mais peu importe. Vous avez exprimé, à cette occasion, une préoccupation liée à la sécurité routière, et je la partage.

Toutefois, je constate qu’en la matière, il y a deux poids, deux mesures. En effet, cet après-midi, en réponse à une autre question au Gouvernement, le ministre de l’intérieur a tenu des propos très clairs sur la sécurité routière, et je l’ai applaudi, car, même si je ne soutiens ni le Gouvernement ni le ministre de l’intérieur, j’approuve que l’on défende la sécurité routière. Il y a quelques années, un autre ministre de l’intérieur, Nicolas Sarkozy, avait, sous l’impulsion de Jacques Chirac, déclaré la guerre à l’insécurité et à la délinquance routières, et, en tant qu’élu local à l’époque, je l’ai toujours soutenu dans cette action. Eh bien, certains députés – peut-être étaient-ce les mêmes –, à droite de l’hémicycle, ont accueilli l’intervention du ministre de l’intérieur par des gestes hostiles. Ainsi, lorsque des sangliers provoquent des accidents de la route, il faut prendre des mesures immédiates et déposer une proposition de loi ; en revanche, lorsqu’il s’agit de multirécidivistes du dépassement des limitations de vitesse ou de la conduite en état alcoolique, il faudrait faire preuve de la plus grande mansuétude ! On a même vu un ancien ministre de la justice – M. Clément, pour ne pas le nommer – faire des signes de dénégation pendant la réponse du ministre de l’intérieur !

S’il s’agissait uniquement d’être pragmatique, il n’y aurait pas deux poids, deux mesures. La réalité est que cette proposition de loi a été rédigée à l’initiative des milieux chasseurs. Vous avez, du reste, vous-même indiqué, monsieur le rapporteur, que vous êtes président du groupe d’études sur la chasse de l’Assemblée nationale, et vous auriez pu préciser que vous êtes député de la Somme.

Monsieur Gremetz, vous savez parfaitement, pour avoir beaucoup instrumentalisé le sujet ces dernières années que, dans cette région, la chasse au gibier d’eau a créé un abcès de fixation. Et l’on a pu déplorer le comportement inacceptable de nombreux chasseurs.

On se souvient que notre ancien collègue Vincent Peillon, aujourd’hui député au Parlement européen, a été victime, il y a quelques années, de violences et de menaces ayant nécessité son évacuation par hélicoptère. Il me semble que l’on ne devrait faire preuve d’aucune mansuétude à l’égard d’individus qui menacent physiquement des représentants de la nation, des élus du peuple.

Il faut reconnaître que vous avez, mes chers collègues de la majorité, une grande aptitude à pratiquer les petits arrangements entre amis et à servir les intérêts particuliers plutôt que l’intérêt général. Cette proposition de loi en constitue malheureusement la preuve. Avec ce qui m’est apparu comme une pointe de malice, mais peut-être me suis-je trompé, Mme la ministre a souligné que vous aviez déjà proposé et fait adopter, il y a moins de trois ans, une proposition de loi sur la chasse. En réalité, ces initiatives visent avant tout à plaire à un certain lobby de chasseurs, et je m’étonne que vous utilisiez une niche parlementaire – l’expression n’aura jamais été employée plus à propos – à cette fin, plutôt que pour tenter de répondre aux nombreux problèmes auxquels la plupart des Français doivent faire face. Vous auriez pu, par exemple, déposer une proposition de loi visant à mettre fin à l’insécurité énergétique de notre pays, ce qui aurait sans doute beaucoup plus intéressé le président de la commission Serge Grouard, qu’une énième proposition de loi sur la chasse.

Je crois surtout que, des élections nationales approchant, la chasse aux électeurs est ouverte ! C’est la réalité, mes chers collègues : vous vous livrez sans vergogne à cette pratique depuis des années !

Chose étrange, deux propositions de loi pratiquement identiques ont été présentées durant le même mois à l’Assemblée nationale et au Sénat, toutes deux émanant du groupe UMP. On pourrait y voir un manque de coordination au sein de votre groupe, puisque l’usage veut que l’on présente une proposition de loi dans une seule assemblée, l’examen du texte dans l’autre assemblée se faisant par le jeu de la navette parlementaire. On peut aussi penser que cette façon de procéder vise uniquement à permettre à plusieurs d’entre vous d’avoir leur heure de gloire.

En tout état de cause, les deux textes présentent très peu de différences, ce qui s’explique par le fait qu’ils sont tous deux issus d’une demande de la Fédération nationale des chasseurs présidée, rappelons-le, par un élu de l’UMP, monsieur Baudin, conseiller municipal de Nice – il a même été conseiller régional de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Un tel mélange des genres est assez étonnant, vous en conviendrez : on pourrait s’attendre à ce que le responsable d’une association regroupant des personnes de toutes sensibilités politiques fasse preuve d’un minimum de neutralité, ce qui n’est pas le cas au vu de son engagement politique.

Cette connivence choquante, chacun des articles de la proposition de la loi en porte la trace : c’est un texte sur mesure, qui montre bien les relations étroites unissant certains chasseurs à une partie de notre classe politique.

Votre regain d’intérêt pour la chasse à l’approche des élections vise, en réalité, à offrir de nouveaux privilèges à des chasseurs qui bénéficient déjà, dans bien des domaines, d’avantages exorbitants. Je pense notamment au droit de propriété, auquel vous êtes disposés à consentir de graves entorses, alors que vous y êtes en général très attachés, chers collègues de la majorité. J’imagine assez bien votre réaction si, dans un autre domaine, le préfet avait autorité pour réquisitionner des terrains afin d’y construire des logements sociaux, contre la volonté de leurs propriétaires qui préféreraient les conserver afin de spéculer : que de cris outragés n’entendrait-on alors devant cette inadmissible atteinte au droit de propriété ! Encore une fois, dès qu’il est question de chasse, c’est deux poids, deux mesures !

Nous ne souscrivons pas à la rédaction du premier article du texte, selon lequel « les chasseurs contribuent à la gestion équilibrée des écosystèmes ». On pourrait discuter, mais cela nous entraînerait assez loin, sur la notion de « gestion équilibrée des écosystèmes ». Si l’on voit ce que vous semblez vouloir dire, cela me laisse, personnellement, plutôt dubitatif. Je pense que les chasseurs peuvent effectivement contribuer à la gestion équilibrée des écosystèmes et, même si je ne suis pas d’accord avec eux sur tous les sujets, j’en connais qui, dans mon département, mènent des actions incontestables en la matière. Ainsi, il y a quelques années, lorsqu’Alain Juppé, Premier ministre, a voulu nous imposer la construction d’une nouvelle centrale nucléaire sur l’estuaire de la Loire, entre Nantes et Saint-Nazaire, les fédérations de chasseurs se sont opposées à ce projet, faisant valoir que celui-ci aurait pour effet de réduire encore les espaces naturels et de supprimer, en les remblayant, des zones humides favorisant la biodiversité.

Soyons honnêtes, tous les chasseurs ne partagent pas ce genre de préoccupation, et il en est qui ne contribuent pas à une gestion équilibrée des écosystèmes, voire qui nuisent au maintien de la biodiversité. Je pense aux pratiques anti-écologiques de certains conduisant à des prélèvements excessifs, par exemple lors de sorties de chasse effectuées en véhicules puissants à quatre roues motrices au sein de zones naturelles sensibles.

Ce premier article montre donc un manque de neutralité de la part des auteurs de cette proposition de loi : il constitue, au contraire, un clin d’œil dans une certaine direction. Vous auriez dû dire que les chasseurs peuvent et doivent contribuer à la gestion équilibrée des écosystèmes : une telle affirmation volontariste aurait constitué un message clair à l’intention des fédérations. On pourrait d’ailleurs dire la même chose au sujet de la servitude de marchepied, évoquée tout à l’heure par Mme la ministre : que les chasseurs aient le droit de se promener sur les bords d’une rivière, je n’y vois rien à redire, mais qu’ils y manipulent des armes est une tout autre affaire ! Vous conviendrez, monsieur le rapporteur, qu’il y a tout de même une petite différence entre un chasseur et un promeneur ou un ornithologue : le premier a une arme à feu entre les mains. Vous dites qu’une personne psychiquement dérangée ne se promène pas avec une arme, mais j’habite pourtant dans une ville où s’est produit, il y a peu de temps, un triste fait divers : un père de famille a tué toute sa famille avec une carabine 22 long rifle héritée de son père, avec laquelle il s’était préalablement entraîné dans un stand de tir. Je ne dis pas que toutes les personnes possédant une arme en viennent un jour à l’utiliser de cette manière, mais je dis que cela arrive et nécessite donc de prendre des précautions. L’utilisation d’une arme ne doit pas être prise à la légère et c’est bien pour cela qu’il existe un permis de chasser, de même qu’il existe un permis de conduire. Si une voiture peut tuer, alors qu’elle n’est pas faite pour cela, une arme est, elle, spécifiquement conçue pour tuer, ce qui exige encore plus de précautions.

Pour en revenir à l’article 1er, je considère qu’il doit être modifié. Je proposerai des amendements visant notamment à faire travailler ensemble les fédérations de chasseurs et les associations de protection de l’environnement, dont les intérêts peuvent, j’en fais le pari, être convergents. Certes, cela ne va pas de soi, et le passé récent montre qu’il vaut mieux être prudent et s’entourer de toutes les garanties. J’ai cru comprendre, en écoutant Mme la ministre, que la prudence lui paraissait s’imposer et je m’associe pleinement à cette vision des choses.

Il convient de rappeler que la chasse n’est pas sans effets sur la biodiversité, ce dont les chasseurs eux-mêmes pâtissent lorsque la ressource cynégétique est gravement atteinte et que certaines espèces se trouvent mises en danger. Nombre de chasseurs le reconnaissent et sont disposés à condamner ceux d’entre eux qui agissent sans en tenir compte. Je voudrais évoquer le droit d’opposition, qui se trouve mis en cause par l’un des articles de cette proposition de loi, relatif au pouvoir donné aux préfets d’intervenir sur des terrains privés en cas de présomption d’insuffisance de chasse – une notion étrange – ou, en tout cas, de surpopulation de gibier, notamment de sangliers.

On pourrait, comme l’a fait Mme la ministre lors d’une récente séance de questions aux Gouvernement, s’interroger sur les autres causes de surpopulation de gibier. Ce phénomène n’est pas toujours lié à une insuffisance de chasse – Jérôme Bignon l’a d’ailleurs lui-même reconnu en posant sa question –, mais peut résulter de modifications de l’écosystème, par exemple, celles liées à certaines pratiques agricoles.

Depuis le mois d’avril, j’ai été interpellé à de nombreuses reprises par des propriétaires de Loire-Atlantique mais aussi des Yvelines, totalement désemparés face aux pressions très fortes qu’ils subissent en exerçant leur droit d’opposition à la chasse. Nous ne souhaitons pas que, demain, les préfets accentuent encore ces pressions à l’encontre de propriétaires qui ont droit à la tranquillité s’ils ne souhaitent pas chasser. Je rappelle que le droit d’opposition à la chasse sur sa propriété est garanti depuis 1999 par une décision de la Cour européenne des droits de l’homme, et nous défendrons ce droit.

Je veux m’attarder sur l’article 7, qui intéresse particulièrement la Vendée. Il se trouve que je suis élu de Loire-Atlantique, un département voisin de la Vendée, avec laquelle il partage d’ailleurs certains espaces naturels, notamment des zones humides de bord de mer. Comme cela a déjà été dit à de nombreuses reprises, notamment devant la commission, cet article est particulièrement choquant, et, bien qu’elle se soit exprimée avec retenue, Mme la ministre elle-même a fait savoir qu’elle était opposée à cet article et qu’elle déposerait des amendements visant à le modifier, ce qui montre bien l’importance que le Gouvernement accorde à cette question.

L’affaire est grave, en effet, car si le principe de la chasse de nuit a été admis en dépit de tous les problèmes qu’il pose – manipuler des armes de nuit n’a rien d’anodin –, cette chasse n’a, par compromis, été autorisée que dans les lieux où elle est pratiquée par tradition. Or, en Vendée, il n’y a aucune tradition de la sorte ! Les premières huttes de chasse n’y sont apparues que durant les années soixante, lorsque des chasseurs de Charente-Maritime ont commencé à les implanter. Ce sont les intérêts financiers qui motivent cette pratique : de telles installations sont louées à prix d’or par leurs propriétaires, qui en tirent des revenus très importants. Sommes-nous là pour satisfaire le développement de quelques intérêts particuliers, mon cher collègue ? Il me semble qu’au contraire, nous sommes élus pour défendre l’intérêt général, si différentes que soient nos conceptions respectives sur ce point. Ne prétendez donc pas défendre les traditions quand il ne s’agit que de business, pour dire les choses de façon triviale.

Si vous avez déjà visité des huttes de chasse, vous devez savoir qu’elles n’ont plus grand-chose à voir avec des installations traditionnelles : ces abris sont de plus en plus élaborés, de plus en plus confortables, et si la chasse n’est parfois qu’un prétexte pour s’y réunir, elle donne lieu, lorsqu’elle est pratiquée de nuit, à de véritables carnages – je dispose de nombreux témoignages précis en la matière – n’ayant rien à voir avec une pratique de la chasse par des gens aimant la nature et désirant simplement se procurer un peu de gibier, ce à quoi je n’ai rien à redire.

Je tiens d’ailleurs à signaler que, en Vendée, la fédération départementale des chasseurs n’est pas favorable à cette évolution. Il y a beaucoup de débats sur la question ! En fait, certains chasseurs, très minoritaires, souhaitent une telle évolution, tandis que les autres n’y sont pas du tout favorables.

Cela n’est pas neutre. Vous savez très bien que si l’on s’engage dans cette direction, la pratique va se développer. En effet, aujourd’hui, dans le cadre de la chasse à la passée, on peut chasser jusqu’à deux heures après le coucher du soleil et deux heures avant le lever. Ce n’est donc pas toute la nuit. Si l’on autorise à chasser toute la nuit, l’activité va forcément se développer, et avec elle la spéculation foncière et les conflits avec les agriculteurs : il y aura des luttes entre les différents usages du terrain. Une telle dérive n’aurait plus rien à voir avec une quelconque tradition de chasse. C’est pourquoi nous nous y opposons de la façon la plus ferme et déterminée.

Nous nous opposons également à l’article 15 qui introduit ni plus ni moins – Mme la ministre n’a pas voulu le dire de façon explicite, mais moi je le fais, comme le feront également des collègues socialistes qui défendront avec nous des amendements de suppression – qu’une forme de milice privée ou de gardes-chasse privés. En ce qui nous concerne, nous sommes attachés au principe républicain selon lequel il s’agit là d’une mission régalienne qui n’a pas à être déléguée à des personnes n’ayant pas de comptes à rendre à l’autorité publique. Nous sommes très clairs sur ce point.

Enfin, nous nous opposons également, de façon très claire et très ferme, à l’exonération de taxe foncière sur les terrains non bâtis. C’est un cadeau de plus, qui est d’autant plus incompréhensible que nous sommes en période de rigueur budgétaire. Alors que les déficits sont énormes, que les collectivités locales ont du mal à boucler leurs budgets, on crée une niche fiscale supplémentaire pour des gens qui n’en ont nullement besoin puisqu’ils louent ces terrains très cher, en tirant ainsi un bénéfice. Vous disiez tout à l’heure, madame la ministre, que c’était tout à fait normal et qu’il n’y avait aucun problème. Pourtant, si c’est une activité économique, elle doit, comme toutes les autres, être soumise à l’impôt. D’ailleurs, je parlais de foncier non bâti, mais on pourrait se demander si les terrains en question entrent bien dans cette catégorie. En effet, je vous le disais tout à l’heure, les constructions que l’on y voit ressemblent de plus en plus à des bâtisses plus confortables que l’hôtellerie de plein air, je peux vous le garantir ! Plutôt que de procéder à une exonération, on devrait assujettir ces installations non seulement à la taxe foncière, mais également à l’ensemble de la fiscalité locale, notamment la taxe d’habitation. Venez voir ce qu’il en est en Vendée, monsieur Bignon ! Votre proposition de loi ne porte pas sur la Somme, ou plus largement sur la Picardie, puisque la pratique y est déjà autorisée, en vertu du compromis passé il y a quelques années, selon lequel on ne revient pas sur cette pratique là où elle constitue une tradition. Je vous parle bien de la Vendée : c’est vous, et non pas moi, qui avez introduit une référence à ce département dans l’article 7 A !

Je vous le dis comme je le pense, je suis totalement opposé à ce nouveau cadeau fiscal que vous voulez accorder à quelques chasseurs, encore une fois très minoritaires, et qui n’ont rien à voir avec le 1,3 million de chasseurs qui existent encore en France. À cet égard, je signale que le nombre global de chasseurs est en diminution. C’est là un fait ; on n’a pas à dire si cela est bien ou mal.

Pour en revenir à la question de ces terrains, on m’a communiqué des chiffres concernant leur valeur. Ils sont colossaux ! Des dizaines de milliers d’euros ! Il n’y a pas beaucoup de régions de France où le foncier non bâti a une valeur pareille. Par ailleurs, vous le savez tous, la taxation sur le foncier non bâti est très faible. Pourquoi donc veut-on l’exonérer ? Pour faire plaisir à des gens qui ont de grandes surfaces. Sinon, cela ne représente rien du tout !

C’est donc un cadeau de plus, dont le seul but est de faire plaisir à quelques personnes.

Encore une fois, ce n’est pas l’objet de ce texte. C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous demande d’adopter cette motion de rejet préalable. Si elle venait à être repoussée, nous continuerions le débat. Pour cela, nous présentons des amendements. Vous l’aurez compris, si le texte restait en l’état, avec ses nombreux articles qui posent problème, nous voterions contre.

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